Mutuelle d’entreprise obligatoire : bilan sur l’année 2016
Le 1er janvier 2016 entrait en application la loi sur la mutuelle d’entreprise obligatoire. Cette mesure qui visait à offrir une meilleure couverture santé aux salariés aura bientôt un an, et il est temps de faire le point sur ce qu’elle a apporté et sur ce qui pourrait encore être amélioré de l’avis des assurés.
Une couverture généralisée à l’ensemble des salariés du secteur privé
L’idée de départ définie par la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013 était de permettre à tous les salariés du secteur privé de bénéficier d’une complémentaire santé obligatoire financée pour partie par leur employeur. Les différentes sociétés ont donc été obligées de négocier et de proposer une mutuelle d’entreprise obligatoire à leurs employés. Pour se conformer à la loi, le choix des entreprises devait se porter sur un contrat conforme aux accords de branche préalablement conclus et comportant une liste des garanties minimales imposées. L’employeur était aussi tenu de participer au financement de la mutuelle à hauteur d’au moins 50%, en échange de quoi il pouvait bénéficier d’une exonération de charges fiscales.
En principe, tous les acteurs devaient bénéficier de cette nouvelle mesure : les salariés en obtenant une meilleure couverture santé à un prix négocié collectivement, et les employeurs qui voyaient là un moyen d’alléger leur fiscalité.
Les points positifs de cette réforme
La souscription d’une mutuelle d’entreprise obligatoire a semble-t-il permis d’améliorer l’accès aux soins des salariés du secteur privé. Le panier de soins minimum prévoit en effet le remboursement du ticket modérateur sur les consultations, les actes et les prestations remboursables par la Sécurité sociale, et le remboursement de la totalité du forfait journalier en cas d’hospitalisation. Il permet également le remboursement partiel des frais dentaires à hauteur de 125% du tarif conventionnel (TC) et un forfait de prise en charge des frais d’optiques fixé à au moins 100 euros. Pour les salariés qui n’avaient pas de mutuelle auparavant, il s’agit incontestablement d’une nette amélioration.
La participation financière de l’employeur permet aussi l’accès à une complémentaire santé à moindres frais. Dans certaines sociétés, la prise en charge est même totale et les salariés ne doivent rien débourser pour en bénéficier. Au sein des grandes entreprises, le grand nombre de salariés a d’ailleurs généralement permis de négocier des tarifs particulièrement avantageux. La mutuelle d’entreprise semble ainsi avoir tout pour plaire et ce n’est pas pour rien que, selon une étude OpinionWay, 74% des Français étaient favorables à l’idée d’une mutuelle obligatoire au sein des entreprises avant sa mise en place. Pourtant les salariés s’interrogent aujourd’hui…
Mutuelle d’entreprise obligatoire : une vraie fausse bonne idée ?
Tous ne sont pas satisfaits : les dirigeants qui ont été contraints de mettre en place un système coûteux et pas toujours simple à gérer, mais aussi les salariés dans certains cas qui ont été déçus, sans même évoquer ceux qui ont tout simplement refusé de se plier à la nouvelle réglementation.
Il apparaît en effet que 25% des entreprises ont choisi des contrats très basiques offrant des garanties moins avantageuses que celles dont disposaient les salariés auparavant avec leur mutuelle privée. Ceci explique le fait que les salariés soient nombreux à avoir invoqué un cas de dispense prévu par la loi pour ne pas en changer. Ceux qui se sont plus docilement pliés à la réglementation ont souvent été contraints de souscrire des garanties optionnelles, voire une sur-complémentaire santé, pour bénéficier d’une meilleure prise en charge. Ces dépenses supplémentaires, à la charge exclusive de l’assuré, viennent ainsi gonfler le budget d’un contrat qui, sur le papier, semblait de prime abord avantageux. Il est même possible que certains assureurs, ayant baissé leurs prix pour remporter de gros marchés, comptent sur ces surcoûts pour rééquilibrer les tarifs des cotisations.
Pour ceux dont les moyens ne permettent pas la souscription de ces options, la mutuelle d’entreprise obligatoire peut signifier un reste à charge majeur sur les prestations de santé, ce qui est précisément l’opposé de l’objectif visé par la réforme.
Et c’est justement cet objectif qui est aujourd’hui remis en cause : selon une étude de la DREES publiée au moins d’avril (direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques), 95% des Français disposaient déjà d’une couverture santé avant même le 1er janvier 2016. Quant aux autres, souvent non-salariés, salariés en contrat court, chômeurs ou séniors, n’étant pas inclus dans la nouvelle loi, leur situation reste pour l’instant inchangée. Parfois même cette mutuelle d’entreprise pourtant obligatoire n’est pas toujours réellement appliquée au sein de certaines entreprises mauvaises élèves.
En conclusion, si la loi relative à la mutuelle d’entreprise obligatoire participe d’une idée égalitaire d’accès aux soins pour l’ensemble des salariés du secteur privé, des disparités subsistent dans les faits et tous ne sont pas satisfaits de cette mesure imposée. Si des effets positifs se sont fait sentir pour certains travailleurs, il apparait que nombreux sont ceux qui auraient préféré avoir le choix et être mieux couverts.