Le marché de la dépendance des personnes âgées suscitent la convoitise des assureurs
La prise en charge financière de la dépendance des personnes âgées ou handicapées, chantier qui sera lancé après l’été par le gouvernement, attire les organismes privés d’assurances ou de prévoyance, qui y voient un marché prometteur en raison de l’allongement de l’espérance de vie.
Nicolas Sarkozy s’est engagé en début de semaine à lancer après l’été un débat sur une meilleure prise en charge des personnes âgées et handicapées. Avec 2 millions de plus de 85 ans attendus en 2015 contre 1,3 aujourd’hui, la nécessité d’une meilleure prise en charge de la dépendance fait l’unanimité. Beaucoup de personnes âgées, y compris de la classe moyenne, n’ont pas de revenus suffisants pour payer aide à domicile ou maison de retraite.
Mais son financement divise. Le gouvernement a assuré jeudi qu’il reposerait “d’abord” sur la solidarité nationale, mais que d’autres financements devraient être mobilisés, comme le “recours à la prévoyance collective et individuelle”, donc le secteur privé. Avec l’une des espérances de vie les plus élevées au monde, la France est l’un des marchés les plus prometteurs, a relevé Olivier Picaud, du cabinet R&B Partners (conseil aux assureurs), lors d’un colloque consacré au financement de la dépendance.
Un marché d’autant plus porteur pour le privé que “les capacités étatiques (de financement) sont arrivées au maximum”, selon Christian Schmidt de la Brelie, du groupe D&O (retraite et prévoyance). Quelles que soient les décisions du gouvernement, il faudra toujours “rajouter de sa poche” pour payer les 1.800 à 3.000 euros mensuels que coûte une place en maison de retraite, abonde Danielle Wajsbrot (Banque Postale) tant les aides publiques actuelles, comme l’Allocation personnalisée d’autonomie (APA, 1,12 millions de bénéficiaires touchant en moyenne 494 euros par mois), sont insuffisantes.
Environ 3 millions de personnes sont couvertes par une assurance dépendance, un marché lancé il y a une vingtaine d’années, selon la Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA). Assureurs et mutualistes évaluent à 10 millions le potentiel de personnes à couvrir.
Si certains organismes se sont lancés très tôt, comme AG2R, d’autres sont arrivés plus récemment, comme la Banque Postale, entrée sur le marché il y a quatre ans. Les mutuelles Macif-Maif-Matmut, qui projettent de se rapprocher, pourraient créer une offre commune d’assurance dépendance. Selon les formules, l’assuré disposera d’une rente et/ou d’un capital lorsqu’il deviendra dépendant.
En cotisant pendant 15 à 20 ans, 20 à 30 euros par mois, on pourra recevoir un capital d’environ 40.000 euros, suffisant pour faire face aux frais de dépendance pendant deux ans, assure Guillaume Sarkozy, de Malakoff-Médéric. Selon lui, le financement de la dépendance n’est donc “pas insurmontable” dans la mesure où l’on considère que “seulement” 15% des plus de 85 ans seront dépendants.
“A condition que l’on s’occupe de ceux qui n’ont pas les moyens. Là, l’Etat doit jouer son rôle”, ajoute-t-il. Comme Daniel Lenoir, de la Mutualité française, beaucoup plaident donc pour un “partenariat” public-privé.
Mais l’assurance-dépendance “n’est pas facile à vendre”, reconnaît Lucie Taleyson (Axa). “C’est un risque très lointain et les gens rechignent à s’en soucier”, abonde Gérard Meneroud, de la FFSA.
Le secteur privé compte sur l’Etat pour encourager les particuliers à souscrire à ce type de produits, par une médiatisation du risque dépendance mais aussi éventuellement par des avantages fiscaux.
AFP