Orages : la grêle pourrait-elle être reconnue comme une catastrophe naturelle ?
Exclue des périls couverts par la garantie catastrophe naturelle des contrats d’assurance, certains élus aimeraient pourtant que la grêle soit prise en compte dans ce régime. Une solution qui pourrait arranger presque tout le monde mais qui semble compliquée.
Les récents orages de grêle du mois de juin ont mis en avant un principe souvent méconnu : tous les désastres climatiques ne sont pas considérés comme des catastrophes naturelles par les assureurs. Pour les particuliers, comme les entreprises, frappés par ces événements, il est difficile de comprendre pourquoi une chute de grêle n’est pas considérée comme une catastrophe naturelle, alors qu’une inondation liée à un débordement de cours d’eau l’est.
Ce fut le cas pour Aymar de Germay, maire (UDI) de Marmagne, face au refus de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle pour sa commune sinistrée le 19 juillet. L’élu de cette commune du Cher (18) avait écrit au ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve sans obtenir de réponse.
Auparavant, Franck Marlin le député-maire (UMP) d’Etampes dans l’Essonne (91) avait rédigé une question écrite à l’attention du ministre de l’Intérieur sur le même sujet. Son argumentation portait sur le principe de couverture du bien, en l’occurrence ici des automobiles. “Consécutivement, cette absence de reconnaissance d’état de catastrophe naturelle implique des frais extrêmement importants pour les particuliers, tels que les propriétaires de véhicules dont l’ancienneté ne justifiait pas la souscription d’une assurance tous risques mais dont l’utilisation reste souvent indispensable pour se rendre sur son lieu de travail. Nombre de ces véhicules ne sont pas réparables, et d’autres ne pourront l’être en raison du coût engendré par la réparation supérieur au prix de l’engin” écrivait-il alors.
Tous les contrats n’ouvrent pas droit à la garantie catastrophe naturelle
En premier lieu, il faut comprendre que tous les contrats d’assurance ne couvrent pas les dégâts des catastrophes naturelles. En effet, le contrat doit couvrir le bien pour que la garantie soit activée. Celle-ci, présente sur les avis d’échéance comme un prélèvement obligatoire, représente une part de la cotisation qui sert à couvrir les périls pris en charge.
Dès lors, le simple fait d’assurer une voiture au minimum obligatoire, c’est à dire en responsabilité civile (assurance au tiers), ne permet pas d’en bénéficier car l’assuré couvre non pas son véhicule mais les dommages que celui-ci pourrait causer à des tiers. La plupart des véhicules non couverts en catastrophe naturelle, le sont pour cette raison. La moindre garantie protégeant le véhicule active en effet la garantie. C’est le cas du bris de glace, du vol et des garanties tous accidents, soit les contrats “tous risques“.
La grêle n’est pas une catastrophe naturelle ?
La définition d’une catastrophe naturelle est assez simple pour un texte de droit : “Sont considérés comme les effets des catastrophes naturelles […] les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l’intensité anormale d’un agent naturel” détaille l’article 125-1 du code des assurances.
Si un orage de grêle peut entrer dans cette classification, il n’est toutefois pas présent dans une liste dans laquelle les périls ne sont en effet pas dénommés. Les effets des vagues, les coulées de boue, les séismes, les mouvements de terrain (y compris en cas de sécheresse), les affaissements de terrain dus à des cavités, les raz de marée, les avalanches, les vents cycloniques et les inondations sont les principaux périls recensés par la Caisse centrale de réassurance (CCR), l’organisme en charge, au nom de l’Etat, d’indemniser les assureurs qui indemnisent les assurés touchés par une catastrophe naturelle.
La question est donc de savoir, pourquoi, dès lors que la liste n’est pas exhaustive, la grêle n’entre pas dans le dispositif. Il s’agit d’une question technique d’assurance. La grêle est déjà couverte dans le cadre d’une garantie des contrats d’assurance habitation, la garantie TGN, “Tempête, grêle, neige” qui couvre des événements naturels dont l’intensité peut-être exceptionnel, mais dont les dégâts ne sont que rarement au niveau des périls inscrits en catastrophe naturelle. Egalement parce que il s’agit de phénomènes plus récurrents, donc ils sont assurables par la mutualisation. Surtout, parce que à la différence des périls “catastrophe naturelle”, ils peuvent toucher à peu près tous les assurés.
En France, le régime catastrophe naturelle est un régime de solidarité. Tous les assurés cotisent, même si le risque ne pèse pas sur tout le monde. Peu de chance d’être frappé par les effets des vagues dans l’est du pays, ni de subir le débordement d’un cours d’eau au 4ème étage d’un immeuble ou encore d’être touché par une avalanche en région parisienne. Ce système dit de “péréquation nationale” est un principe fondamental du régime, et le justifie, au grand regret des entreprises qui, parfois, ne comprennent pas pourquoi payer pour des périls contre lesquels elles ne risquent rien et prennent des mesures de prévention.
Car le régime a un coût. Sur les contrats habitation des particuliers, la garantie cat’ nat’ représente 12% du montant des garanties liées à la protection des biens. Le pourcentage est de 6% pour les véhicules.
Qui reçoit l’argent, qui indemnise ?
L’assuré n’a aucun lien direct avec la CCR qui couvre les dégâts causés par les catastrophes naturelles. En effet, il paye la prime cat’ nat’ à son assureur, qui reverse ensuite cette prime à la CCR. Comme son nom l’indique, la CCR est un réassureur, c’est à dire l’assureur d’un assureur. Comme pour un particulier, elle couvre l’assureur après application d’une franchise.
Si le système vous intéresse particulièrement, rendez-vous sur News Assurances Pro pour lire quelques articles sur les sociétés concernées, et sur le site de CCR qui explique bien les rapports assureurs – réassureurs.
Dès lors, c’est l’assureur qui va indemniser l’assuré (particulier comme entreprise) après application d’une franchise déterminée.
Ensuite, l’assureur se fait indemniser à son tour par la CCR, qui bénéficie de fonds illimités en théorie, puisque l’Etat, son unique actionnaire, est son garant.
En conclusion : et la grêle alors ?
Alors la grêle n’est pas une catastrophe naturelle mais pourrait peut-être le devenir. Les assureurs ont été largement échaudés par les orages de l’été 2013 (environ 800 millions d’euros) et de juin 2014 (900 millions d’euros prévus) qui pèsent sur leurs comptes et devraient encore faire augmenter le prix des assurances habitations en 2015, en raison du déséquilibre entre les sommes perçues et les sommes payées. Pourtant, si la réforme en prévision du régime cat nat apporte une possibilité de re-qualifier les périls et les seuils et taux de prise en compte, la fréquence et la présence sur la quasi totalité des zones du territoires des orages de grêle laissent à penser que le risque reste “assurable”.
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