Complémentaire santé : Les franchises cautionnées, un modèle d’avenir ?
DOSSIER – PORTRAIT – 2eme partie
Après avoir abordé la naissance des franchises cautionnées, Jacques Garot, directeur général de Groupe France Mutuelle, parle maintenant du produit actuel, de son fonctionnement et de la concurrence naissante. Avec toujours, fermement ancré en lui, le sentiment que ce système est l’avenir des complémentaires santé.
« Les franchises doivent faire prendre conscience aux assurés que quand ils dépensent, ça joue sur la collectivité et que les petites actions de chacun ont des conséquences très grande sur la société et le système de santé » pour Jacques Garot.
Parmi les « petites actions », Jacques Garot vise autant le professionnel de santé que l’assuré. « Avec une complémentaire qui rembourse 300% du tarif conventionné d’une consultation chez un spécialiste, l’assuré ne se sent pas concerné si ce spécialiste passe en quelques années de 200 à 250 puis 300% du tarif. Les autres assureurs sont ensuite obligés d’augmenter les tarifs et les assureurs râlent. Alors qu’un assuré chez nous se mettra face au professionnel de santé pour lui dire que les augmentations sont prises sur sa caution. »
Si les franchises cautionnées sont un système de régulation, il serait logique de se demander s’il n’existe pas un effet pervers simple : moins se soigner pour récupérer une partie de sa caution. Mais M. Garot n’est pas d’accord. Pour lui, c’est un système dans lequel l’assuré « ne fait pas n’importe quoi. Les assurés se disent ‘soignons nous au prix juste mais soignons nous’. Il ne faut pas oublier que les assurés font l’effort de se garantir, pour être couvert ‘en cas de problème’ ! Nous remboursons 50% du montant de la caution en moyenne, c’est bien la preuve que les gens se soignent ! »
« Le patient est un consommateur effréné »
« En moyenne, dans le Groupe France Mutuelle, un assuré en franchise cautionnées dépense 40% de moins qu’un assuré dans la formule normale. » poursuit-t-il.
La responsabilisation du patient-assuré joue à plein. Régulation des dépenses, solidarité qui joue à plein, les franchises cautionnées seraient un modèle à suivre.
« A la création du produit, on nous a dit que le système mettait en péril la solidarité mutualiste. Mais au contraire, je le trouve beaucoup plus solidaire ! La part de cotisation de l’assuré va directement à la solidarité avec les malades et quand l’assuré est à son tour malade et a besoin de se soigner il se sert sur sa caution, sans toucher au fond commun des cotisations ! Les plus malades ne paient pas les dépenses courantes des moins malades. »
Aujourd’hui, Groupe France Mutuelle compte environ 12 000 adhérents soit à peu près un tiers des assurés de la mutuelle. En fonction des réseaux de distribution, courtiers ou agences, le produit représente 25 à 50% des ventes. En 1996, le concept avait séduit 50 adhérents, puis 300 en 1997… Chaque année, GFM compte environ 10% d’assurés en plus au produit.
« L’arrivée d’assureurs sur le marché nous a montré qu’on n’avait pas tout à fait tort »
Mais la plus grande victoire de Jacques Garot est sans nul doute d’avoir vu l’arrivée en 2007 de MMA sur le marché des franchises cautionnées. « Leur arrivée n’a eu que des effets positifs, ou presque. Hormis les discours de postures, ils ont permis de parler du produit qu’ils ont mis sur le devant de la scène. Et ça nous a permis à nous de monter au créneau et de soutenir le principe, sans jamais attaquer MMA. » Le produit arrive sur la scène nationale et AGF suit avec la création de « Ma santé », basé sur le même principe.
S’apercevant que le concept est dévoyé GFM décide de le protéger. « Nous en avons profité pour créer un label avec Afnor pour que ‘franchises cautionnées’ soit un terme protégé et qu’il ne puisse pas servir à tous les abus. »
Dès lors, les franchises cautionnées deviennent un système de santé à part entière. Et Jacques Garot prédit « à partir du moment qu’un nombre important d’assureur propose ce système, les autres devront suivre. Car comment faire si chaque année les assurés qui consomment le moins partent à la concurrence ? Les écarts de prix vont être de plus en plus élevés car les assureurs qui sont restés aux complémentaires santé classiques seront obligés d’augmenter les prix. »
Et la crise pourrait multiplier cet effet. La possibilité de se voir rembourser une partie de sa cotisation en fonction de sa consommation va forcément jouer dans l’arbitrage tarifaire des ménages. « La crise est profonde et va bouleverser la société, l’état d’esprit des gens va changer et les franchises cautionnées ont un atout : elles permettent d’être couvert correctement et à moitié prix. »