Grippe H1N1: la France cherche à se délester de son surplus de vaccins
La France a commencé à revendre à l’étranger une partie de son stock de vaccins contre le virus de la grippe A-H1N1 commandés en excédent, afin d’alléger la facture de cette campagne.
Dans la perspective d’une pandémie mondiale redoutée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le ministère de la Santé avait commandé l’été dernier 94 millions de doses de vaccins – d’un montant total de 869 millions d’euros selon le ministère – tablant sur une double injection pour chaque sujet.
Mais il est apparu, dès le 20 novembre, qu’une dose unique suffisait à protéger les patients. “On était parti sur un schéma de vaccination à deux doses, mais dès lors qu’une seule dose suffit, on peut se permettre de revendre une partie du stock”, a expliqué dimanche à l’AFP une porte-parole du ministère, confirmant des informations du quotidien Le Parisien.
Dès lors, la France a commencé à se tourner vers l’étranger pour écouler ses stocks. Parmi les premiers acquéreurs, le Qatar a déjà acheté 300.000 doses et la négociation est bien engagée avec l’Egypte pour 2 millions de doses, a précisé le ministère.
Sanofi Pasteur, la division vaccins du groupe Sanofi-Aventis, s’est déclarée dimanche “disposée à examiner” une éventuelle demande de renégociation du contrat d’achat de doses de vaccins avec le gouvernement français. “Pour l’instant, il n’y a pas eu de renégociation du contrat mais s’il devait y avoir des demandes du gouvernement, Sanofi Pasteur serait disposé à les examiner”, a affirmé à l’AFP un porte-parole du laboratoire.
Le député Jean-Marie Le Guen, spécialiste au PS des questions de santé, a réclamé dimanche “une mission parlementaire pour faire le bilan et tirer des leçons” de cette campagne qu’il a qualifiée de “fiasco”, aboutissant “à ce que nous ayons le plus faible taux de personnes vaccinées des pays développés”.
Depuis le début de la campagne de vaccination, lancée le 21 octobre, seules 5 millions de personnes environ ont été vaccinées.
Selon le ministère, des négociations sont également en cours avec le Mexique et avec l’Ukraine, où la France est en concurrence avec l’Allemagne qui essaie elle aussi de se défaire de ses excédents en vendant à Kiev 2,2 millions des 50 millions de doses commandées.
Les Pays-Bas également, qui avaient commandé 34 millions de doses ont annoncé leur intention d’en revendre 19 millions “à des pays manquant fortement de vaccins”. Deux millions avaient déjà trouvé preneurs en décembre, selon le ministère néerlandais de la Santé.
La commande française, d’un montant total de 869 millions d’euros, avait été passée auprès de quatre laboratoires différents – GlaxoSmithKline (GSK), Novartis, Sanofi-Pasteur et Baxter – ayant obtenu l’aval de l’agence européenne des médicaments (EMEA).
Pour le Pr Marc Gentilini, spécialiste des maladies infectieuses et ancien président de la Croix rouge française, ce gâchis était prévisible: “On se trouve devant un phénomène d’emballement qui me désespère”, a-t-il confié à l’AFP, très sévère sur la stratégie de “vaccination de masse”. “Jouer le pire n’était pas forcément jouer juste et ceci se fait au détriment d’autres problèmes de santé publique, nationaux ou internationaux”, a-t-il souligné. D’autant que, compte-tenu des mutations déjà avérées du virus, ces vaccins risquent “à la longue de ne plus répondre au type de virus en circulation”.
La France avait déjà offert en septembre 9 millions de doses à l’OMS, dans le cadre d’un effort conjoint avec les Etats-Unis, l’Australie, le Brésil, l’Italie, la Nouvelle Zélande, la Norvège, la Suisse et le Royaume Uni, pour mettre 10% de leurs stocks au bénéfice des populations des pays les plus pauvres.
Signalé pour la première fois fin mars au Mexique, le virus H1N1 s’avère pour le moment moins meurtrier que redouté. Fin décembre, il avait causé près de 200 décès en France et 12.200 à travers le monde, dont 10.000 aux Etats-Unis, de loin le pays le plus touché.
Pour l’OMS cependant, “il est trop tôt et prématuré d’affirmer que l’on soit arrivé à la fin de la pandémie au niveau mondial”.
Paris, 16 janv 2010 (AFP)