Dossier « pro »: Métiers à risque, comment les journalistes de guerre sont-ils assurés ?
Parmi les professions les plus exposées et les plus difficiles à assurer, le métier de reporter de guerre n’est pas en reste. Lorsque les journalistes partent couvrir un événement à l’étranger, notamment lors d’un conflit dans un pays en guerre, les risques de se faire tuer sont grands, sans parler des enlèvements ou encore des séquelles dues aux traumatismes ou aux blessures. On peut alors se poser la question de savoir comment est protégée cette activité dangereuse et surtout à quel prix les organes de presse garantissent-ils la sécurité de leurs employés. Selon Reporters sans frontières (RSF), 76 journalistes ont été tués en 2009, 33 ont été enlevés et 573 arrêtés.
Peu d’assurances se risquent aujourd’hui à garantir les journalistes de guerre. Depuis la fin des années 80, la sécurité de ces derniers, notamment lors des reportages dans les pays en crise, est devenue une question cruciale. Face à des assureurs qui refusent très souvent de couvrir les reporters en mission, les rédactions se voient obligées de payer des cotisations astronomiques en responsabilité civile pour assurer ceux qui sont au cœur des conflits. Une situation intenable qui pousse parfois certains grands médias a envoyer des reporters sans assurance sur des terrains exposés… Face à cette situation, Reporters sans frontières a donc crée il y a quelques années une assurance spécialement dédiée aux journalistes en missions professionnelles.
« Les tarifs élevés des assurances, ainsi que les lourdes formalités qu’il est parfois nécessaire d’accomplir, nous ont poussé à créer deux polices d’assurance spécialement dédiées aux risques de guerre » explique Martial Tourneur de RSF. La première police se nomme « formule essentielle », c’est une garantie assistance où la prise en charge du risque de guerre est acquise en tout lieu. Cette formule ne peut être souscrite si le journaliste est embarqué dans une unité militaire ou gouvernementale pendant sa mission. Pour la seconde police appelée « formule renforcée », il y a des garanties supplémentaires sur la formules précédente, notamment une couverture de maladies préexistantes (asthme, problèmes cardiaques…) s’il advenait des complications découlant de celles-ci lors des missions. Il y a également une possibilité de disposer du versement d’un capital en cas de décès accidentel ou de mutilation au cours de la mission professionnelle.
« Nous avons un partenariat avec un courtier canadien, Escapade Assurance, et nous proposons aux journalistes un service supplémentaire simplifié pour qu’ils puissent partir en dehors de leur pays de résidence. Ces polices sont sur-mesures et destinées plutôt a des reporters indépendants, car en général les grands médias ont leur propres assurances. Il faut simplement qu’ils soient membre de RSF et ils bénéficient alors de conditions avantageuses. » ajoute-t-il.
De son côté, Ace Europe est l’un des seuls courtiers en assurances à prendre en charge les journalistes de guerre. Face à ce métier à risque, la compagnie propose une garantie baptisée «Ace Business Class» en partenariat avec Audiens. cette dernière protège tous les partenaires d’une entreprise, les salariés et leur famille, les administrateurs ou encore les prestataires de service ayant un ordre de mission. Toutes les zones géographiques sont couvertes, et la prise en charge des frais médicaux (avec règlement direct en cas d’hospitalisation) s’élève désormais à 10M d’euros. « Lors d’enlèvements par exemple, notre garantie permet de libérer des frais pour les recherches des personnes kidnappées (voyage, hébergement, intendance, etc…). De plus, nous mettons aussi à disposition des consultants professionnels spécialistes des enlèvements qui peuvent aider les organismes à retrouver l’individu enlevé » nous explique Goulven Thépot, Responsable souscription et développement du département assurance d’Ace Europe. « S’il pèse une menace d’attentat ou un risque d’enlèvement lors d’une mission à l’étranger, cette assurance prend également en charge les frais de rapatriement des personnes sur le terrain » ajoute-t-il.
Parallèlement, la Fédération internationale des journalistes (FIJ) a lancé un programme d’action mondial pour la protection des journalistes qui couvrent des conflits armés. Depuis 2003, l’Institut international pour la sécurité de la presse (INSI) développe de son côté des programmes d’assistance dans les zones dangereuses pour les reporters. Il s’occupe également de tous les aspects relatifs à la sécurité et à la protection sociale des journalistes et du personnel des médias, notamment en s’efforçant d’obtenir pour eux des assurances à prix réduit et ainsi que des services de conseils sur les traumatismes et le stress pour les aider à surmonter les tensions qu’ils subissent lorsqu’ils travaillent dans des conditions difficiles.