Assurance vie : Quelles sont les raisons de la dégringolade du placement numéro 1 des français ?
Placement préféré des Français, l’assurance-vie souffre d’une désaffection relative depuis le début de l’année, victime de la baisse de son rendement, du relèvement du taux du Livret A mais aussi de l’incertitude née de la réforme en cours de la fiscalité du patrimoine.
La collecte nette (versements moins retraits) sur les contrats d’assurance-vie durant les trois premiers mois de 2011 a été la plus faible depuis huit ans pour un premier trimestre.
Premier élément d’explication, les taux de rendement des contrats en euros (à capital garanti) ont de nouveau connu un repli en 2010 et se rapprochent souvent de 3,50%. Le taux du Livret A, relevé à 2% depuis début février et probablement à 2,25% au moins en août prochain, n’est plus très loin, d’autant qu’il est totalement défiscalisé.
“La concurrence est rude” avec les autres produits d’épargne, reconnaît Jérôme Cornu, directeur des études et statistiques à la Fédération française des sociétés d’assurance (FFSA).
D’autant que les banques, pressées par l’entrée en vigueur prochaine d’un nouveau cadre réglementaire, dit Bâle III, privilégieraient à l’assurance-vie et au Livret A des produits dits de bilan, c’est à dire sur lesquels elles gardent la main. “Il apparaît presque certain que plusieurs grands réseaux bancaires (mais pas tous) ont reçu instruction de leur maison mère de freiner la collecte d’assurance-vie et d’orienter les épargnants vers des produits bancaires”, tels que les livrets d’épargne ou les comptes à terme, a affirmé le Groupement des entreprises mutuelles d’assurance (Gema) dans sa lettre d’information de mai.
A cela s’ajoute la réforme en cours de la fiscalité du patrimoine, annoncée depuis l’automne mais dont la teneur est restée très incertaine, jusque mi-avril. Il a longtemps été question d’un durcissement de la fiscalité de l’assurance-vie, principalement pour les gros contrats, avant que le gouvernement n’y renonce. “Les épargnants sont très sensibles aux changements de législation fiscale et les idées émises en l’espace de quelques semaines (…) ont dû en perturber plus d’un”, regrette le Gema.
L’attentisme pourrait se prolonger, car “on est en période pré-électorale et on voit qu’il y a beaucoup d’agitation autour de la fiscalité”, observe Paul Younès, directeur général adjoint de l’Union Financière de France, société de gestion de patrimoine.
Plus inquiétant, la mauvaise passe ne concerne pas que le ralentissement des versements, mais aussi l’accélération des rachats ou retraits. Le mouvement s’est amorcé à l’automne dernier, s’est poursuivi au premier trimestre 2011 et inquiète car il n’est pas clairement compris. “Un des facteurs d’explication pourrait être lié au fait qu’un nombre important d’épargnants puisent dans leur contrat d’assurance vie pour compléter leur retraite”, avance M. Cornu.
Pour autant, selon les chiffres de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav), le nombre de personnes ayant exercé leur droit à la retraite est plutôt en baisse en 2010 par rapport aux années précédentes.
M. Younès évoque lui le cas d’épargnants titulaires de contrats en unités de compte (à capital non garanti et qui sont souvent investis en actions), malmenés par la crise financière, qui “se disent qu’avec l’embellie boursière, c’est le moment de sortir”. “Notre crainte, c’est qu’on ait de nouveau une collecte nette négative (mensuelle) en 2011”, explique M. Cornu, ce qui n’est arrivé que deux fois dans l’histoire de la FFSA, en octobre et décembre 2008, au plus fort de la crise financière.
Avec AFP