La plainte d’une épargnante conduit à la première enquête en France confiée à un juge sur la fraude Madoff
Une information judiciaire, la première en France liée à la fraude imputée à Bernard Madoff, a été ouverte vendredi à Paris à la suite d’une plainte d’une épargnante française qui s’estime lésée par des placements réalisés par un fonds luxembourgeois auprès du financier américain.
Le parquet a ouvert une information judiciaire contre X pour “abus de confiance aggravé”, “escroquerie aggravée”, “recel en bande organisée” et “blanchiment en bande organisée”, selon une source judiciaire. Un juge d’instruction devait être désigné dans les prochains jours pour mener cette enquête. L’ouverture de cette information judiciaire fait suite au dépôt d’une plainte en janvier par une Parisienne de 66 ans qui avait investi 540.000 euros dans le fonds Luxalpha de la banque suisse UBS.
Luxalpha est un fonds d’investissement basé au Luxembourg qui a placé les sommes drainées auprès des épargnants européens dans les sociétés de Bernard Madoff. Lors de la découverte de l’escroquerie en décembre, les économies de l’épargnante ont disparu. “Ma cliente est très contente de l’ouverture de cette information judiciaire, on va commencer à entrer dans les choses sérieuses”, a déclaré à l’AFP l’avocat de la plaignante, Me Jean Reinhart. Selon lui, “il y a des investigations à faire au Luxembourg”. “Ce que je veux, c’est qu’UBS s’explique, ce que la banque n’a pas fait depuis six mois, qu’elle donne les clés du dossier”.
Luxalpha est également au coeur d’une action intentée au civil à Paris par une ancienne hôtesse de l’air qui a assigné la Société générale et UBS après avoir perdu ses économies placées par ces banques dans le fonds luxembourgeois.
Deux autres plaintes liées à la fraude Madoff ont été déposées à Paris depuis le début de l’année et ont entraîné l’ouverture d’enquêtes préliminaires qui restent en cours.
La première avait été déposée par une société française qui affirme avoir été trompée par la BNP qui aurait investi son argent dans un fonds domicilié dans les îles Vierges britanniques, “groupement financier” derrière lequel se trouverait Bernard Madoff, et enregistré de lourdes pertes. Le siège de la BNP avait été perquisitionné le 26 mars dans le cadre de cette enquête préliminaire.
La seconde plainte, visant une société parisienne de conseil financier, a été déposée au nom d’un commerçant qui avait placé, en 2006, 2 millions de dollars dans un “hedge fund” (fonds d’investissement spéculatif) installé aux Bermudes et aux îles Vierges britanniques, Kingate Management, derrière lequel
se trouvait Bernard Madoff.
L’Autorité des marchés financiers (AMF), le “gendarme” de la Bourse, a confirmé jeudi qu’elle avait lancé des contrôles sur les conditions de commercialisation de produits exposés à la fraude Madoff par des intermédiaires financiers français.
L’AMF avait révélé en décembre qu’une centaine de fonds français pourraient être affectés par cette escroquerie, à hauteur de 500 millions d’euros.
Au total, entre 3.000 et 5.000 personnes en France pourraient avoir perdu leurs économies à cause de la fraude pyramidale commise par Madoff, selon des estimations de l’AMF confiées à plusieurs avocats.
A New York, le juge Denny Chin doit rendre le 29 juin sa sentence dans le procès intenté par le gouvernement américain à Bernard Madoff, 71 ans, inculpé d’une gigantesque escroquerie portant sur quelque 50 milliards de dollars.
AFP