Braquage : Bijoutiers, pouvez-vous compter sur votre assureur ?
Le bijoutier-horloger Vacheron Constantin s’est fait cambrioler le 4 octobre dernier à Paris par un commando de 15 malfrats. Selon l’estimation de l’UBH, Union de la bijouterie horlogerie, à l’heure actuelle une bijouterie se fait braquer chaque jour en France.
Un mois après le casse éclair à la voiture bélier d’une bijouterie de luxe rue Castiglione (2M d’euros de préjudice), Paris a de nouveau été le théâtre d’un braquage d’envergure. Attaqué au 2 rue de la Paix le vendredi 4 octobre sur les coups de 11h35, le bijoutier-horloger Vacheron Constantin a été assailli par pas moins de 15 malfaiteurs.
La méthode “smash and grab raid”
Deux hommes apprêtés ont tout d’abord pénétré dans la boutique. En ouvrant la porte, ils ont laissé s’insérer un troisième homme armé, qui a précédé l’arrivée de six autres complices cagoulés et munis, pour leurs parts, de masses et de haches. Chacun s’est affairé à casser les vitrines des présentoirs afin de dérober une vingtaine de montres, estimées à plusieurs centaines de milliers d’euros chacune. Les malfrats sont repartis par la rue de la Paix, en courant.
Cette technique du “braquage commando”, encore inédite en France, n’en est pourtant pas à son galop d’essai en Europe. Surnommée “smash and grab raid” (“tu fracasses et tu ramasses”), la méthode a déjà fait ses preuves en Italie, en Espagne, en Belgique, au Royaume-Uni, au Danemark, ou encore en Bulgarie. “La recrudescence actuelle de vols ne m’inquiète pas. Il y a des cycles, nous avions connu le même il y a 10 ans. Ce qui est inquiétant par contre, c’est ce braquage en commando de 15 hommes. C’est une nouveauté qui a fonctionné et qui risque de se répandre” confie Gérard Bénézat, assureur de Vacheron Constantin chez le courtier Siaci Saint Honoré.
Et si le butin est retrouvé ?
Deux braqueurs mis en examen le jour du cambriolage, cinq de plus interpellés ce mardi 8 octobre, le gang, spécialiste des casses éclair, est peu à peu en train de tomber. Mais pour l’heure, aucun d’eux n’a levé le voile sur l’endroit secret où a été conservé le butin.
Si la probabilité semble minime, il arrive parfois que les enquêteurs parviennent à retrouver les bijoux volés. Trois configurations sont alors susceptibles de se produire. Dans la première, la plus fréquente, la police clôt son enquête en statuant que le butin ne sera pas retrouvé. L’assureur verse alors l’indemnisation requise, selon les termes du contrat d’assurance souscrit. Seconde possibilité, les bijoux sont retrouvés, mais trop tardivement car la compagnie d’assurance a déjà versé le dédommagement. Elle devient alors le propriétaire légal des objets précieux. Enfin, dernière solution, les bijoux réapparaissent avant versement de l’indemnité, le joaillier récupère ses biens sans que l’assureur n’ait à intervenir.
Les bijoutiers sont-ils suffisamment assurés contre le risque de braquage ?
“Dans notre portefeuille, et nous couvrons 80% des enseignes de luxe en France, les bijoutiers se montrent très professionnels et vigilants avec leur assurance” explique Gérard Bénézat. Vacheron Constantin, qui était suffisamment protégé moyennant une prime annuelle salée (entre 2% et 3% du stock global en règle générale), se verra intégralement indemnisé pour les pertes subies. “Nous remboursons à 100%, dans un délai de 3 semaines à 1 mois si la boutique était organisée et tenait une comptabilité claire et rigoureuse”.
Si les joailliers appartenant aux chaînes de grand luxe peuvent, eux, se prévaloir de détenir de bonnes couvertures d’assurance, il n’en est rien pour les bijoutiers indépendants. En fonction de la zone d’implantation, jugée risquée ou non, et à cause de la récente fréquence des vols, les tarifs s’envolent. “Oui je suis assuré, c’est une obligation, mais au minimum. Si je me fais voler, je serai peu remboursé et de toute façon, le temps que l’assurance me prenne en charge, j’aurai fait faillite” déplore un bijoutier installé depuis 9 ans dans le 13ème arrondissement de la capitale.
Selon Gérard Bénézat, assureur chez Siaci Saint Honoré, les récents évènements, qui ont retranscrit des dérapages de bijoutiers détenteurs d’armes, seraient dus à des problèmes d’assurance. “Ceux qui ont des armes derrière leurs comptoirs, ce sont les petits bijoutiers qui n’ont pas d’assurance ou sont mal couverts. Ça coute très cher de pouvoir protéger tout son stock. Et pour un bijoutier, sa boutique c’est tout son patrimoine”.
Gare aux négligences !
Enfin, un détail qui peut parfois couter plusieurs milliers d’euros à un bijoutier, les négligences et petites désinvoltures en matière de sécurité. En règle générale, les joailliers sont couverts par des contrats “tous risques sauf”. Ce qui signifie qu’ils sont protégés contre tous les préjudices, exception faite des exclusions explicites stipulés par l’assureur. Pour accepter tous les termes du contrat, la compagnie d’assurance impose toutefois que soit installé un performant système de protection (grillage, double vitrage, caméras de surveillance, alarme…). Un bijoutier qui se révèle négligeant en ne respectant pas ces exigences de sécurité ou en oubliant de fermer une porte ou un coffre, pourra voir son indemnité réduite en cas de vol, voire même totalement refusée.