Fiscalisation des mutuelles santé entreprises, quel impact sur les salariés ?
Le gouvernement a confirmé le 11 septembre dernier que serait supprimée l’exonération fiscale dont bénéficiaient les salariés sur leur mutuelle entreprise. Une annulation qui devrait augmenter l’impôt sur le revenu de tous les employés concernés de 70 euros en moyenne.
Le 11 septembre dernier, lors de la présentation du projet de loi de Finances (PLF) 2014, Alain Vidalies, ministre chargé des Relations avec le Parlement, a expliqué que la déduction fiscale dont jouissaient 76% des salariés sur leur contrat d’assurance complémentaire d’entreprise serait partiellement supprimée. Un dispositif qui avait pourtant pour but initial de faciliter l’accès généralisé à la santé.
Quelle incidence directe sur les salariés ?
Jusqu’à présent, une intéressante niche fiscale s’offrait aux détenteurs d’une assurance santé entreprise. “Dès lors que le contrat collectif était obligatoire, responsable et solidaire, la cotisation ne rentrait pas dans l’assiette de l’impôt sur le revenu”, explique Vincent Harel, Directeur du département Argus Mercer, qui s’occupe des particuliers et petites entreprises chez Mercer France.
Cette niche fiscale était bien loin de se révéler mirobolante, mais profitable tout de même. Ainsi, les salariés se voyaient automatiquement exonérés, sur leur déclaration annuelle de revenus, de la cotisation globale à leur mutuelle entreprise : part employeur + part salarié. Avec cette nouvelle mesure gouvernementale, seule la part salarié pourra désormais être déduite.
“Ça va augmenter les impôts pour les salariés éligibles à l’impôt sur le revenu. En moyenne, l’augmentation va être de l’ordre de 5%, soit 70 euros, ce qui n’est pas négligeable. Et ce sera bien supérieur pour ceux se trouvent dans des tranches marginales plus élevées”, précise Vincent Harel. A titre d’exemple, pour une cotisation mensuelle de 60 euros, dont 30 euros supportés par l’employeur (50% du prix généralement), l’exonération fiscale était jusqu’alors de 720 euros (60 x 12). Dorénavant, elle ne sera plus que de 360 euros (30 x 12). Selon le quotidien Les Échos, cette suppression de l’avantage fiscal devrait entrainer une hausse globale de l’impôt sur le revenu “de près d’un milliard d’euros pour les 13 millions de salariés concernés”.
Les conséquences annexes à redouter
Au-delà de l’incidence basique et directe de l’augmentation d’impôts, des conséquences annexes sont à envisager. Pour les spécialistes, la perte de toutes les exonérations actuelles est à redouter. “Il était prévu que cette mesure [de fiscalisation de la part employeur] soit étudiée le 15 septembre de l’année prochaine. On est donc déjà en avance de phase. Mais ce qu’on peut anticiper la dessus c’est que ça pousse à des comportements de démutualisation“, présage Vincent Harel.
En effet, les niveaux de garantie santé proposés par les entreprises risquent de se réduire comme peau de chagrin, pour devenir de plus en plus faibles avec une individualisation des couvertures avec options. “C’est un paradoxe, la généralisation de la complémentaire santé a pour vocation de couvrir mieux les salariés mais il se pourrait que ce soit finalement le contraire qui se passe”, prévient le Directeur de département de Mercer.
Les motivations du gouvernement ouvrent aux doutes
Sur la chaîne LCP, Alain Vidalies a expliqué la motivation du gouvernement à supprimer cette niche fiscale. Le ministre la juge inéquitable, dans la mesure où elle ne profite réellement qu’aux cadres supérieurs. L’idée serait donc de la réorienter vers ceux qui en ont davantage la nécessité; les 750.000 bénéficiaires supplémentaires de la CMU-C. Pourtant, la couverture maladie universelle complémentaire est déjà financée par une taxe dédiée, prélevée sur les contrats d’assurance santé.
Pour l’heure, les ambitions gouvernementales restent singulièrement opaques. “Les bruits qui circulent c’est que seule la part employeur va être fiscalisée. Mais d’autres rumeurs indiquent que la totalité de la cotisation rentrera dans l’assiette de l’impôt sur le revenu. Dans tous les cas, le salaire fiscalisé affichera une hausse entre 500 à 1.000 euros, avec donc une couverture santé qui coutera plus cher, notamment pour les jeunes et les célibataires aisés qui paieront en quelque sorte pour les familles non imposables”, conclut Vincent Harel.