Assurance décès : Jamel Leulmi condamné à 30 ans de prison
La cour d’assises de l’Essonne a condamné jeudi Jamel Leulmi à 30 ans de réclusion pour avoir tué sa femme et tenté de faire assassiner une autre conquête afin d’empocher des millions d’euros en assurance-décès.
Un deuxième procès se profile, après l’annonce par ses défenseurs de leur intention de faire appel. Pour l’heure, l’accusé, qui a écouté le verdict tête basse et mains croisées, est “sous le choc“, selon l’un de ses avocats, Me Eric Dupond-Moretti.
“Je pense que le mobile qu’on lui prête a balayé comme un tsunami le reste“, a-t-il déclaré, en mettant en avant l’absence de preuves selon lui. Trois semaines et demie d’audiences-marathon, un défilé ininterrompu de témoins, de l’enquêteur aux petites amies, en passant par l’expert psychiatrique, n’auront pas permis de faire la lumière sur cet homme de 36 ans, dont un avocat des parties civiles a dénoncé le “machiavélisme absolu”.
L’avocat général – qui avait requis la réclusion à perpétuité – dépeint un “être cupide, calculateur, déterminé à gagner, y compris en supprimant la vie“, quand ses avocats le disent “incompris”, “effondré”, victime d’un complot qui le dépasse et surtout d’une incroyable série de coïncidences.
Lui, le beau gosse bodybuildé, toujours parfaitement vêtu malgré quatre ans de détention provisoire, a fait preuve d’un calme olympien et d’une infinie politesse au moment de répondre à l’accusation, connaissant son dossier sur le bout des doigts et semblant avoir réponse à tout. Sauf sur certaines questions, trop insistantes. “Je n’ai pas d’observation”, “c’est trop confus“, marmonne-t-il alors.
Trois femmes fragiles
L’affaire Leulmi, ce sont trois femmes “fragiles“, sous le charme, qui ont souscrit des assurances-décès pour des montants faramineux au bénéfice de l’accusé. L’une est morte après un curieux accident, la deuxième a miraculeusement survécu à une mystérieuse agression et la troisième doit peut-être la vie sauve à l’interpellation en août 2010 du playboy de Brétigny-sur-Orge (Essonne).
Première victime, Kathlyn Vasseur, qu’il épouse en catimini après une relation éclair. Elle décède trois mois plus tard, début 2007, après avoir souscrit pour 2 millions d’assurance décès. L’enquête de gendarmerie conclut à un accident de vélo, mais des témoins ont décrit au procès l’étonnante attitude de Jamel Leulmi qui, contre toute logique, s’appuie de longues minutes contre le corps de sa femme sur le bord de la route comme pour l’étouffer.
Deux ans plus tard, Julie Derouette, une mère célibataire, croise sa route et s’éprend follement de lui. Il lui promet le mariage, dit-elle, deux mois à peine après leur rencontre. Elle part fin 2009 le rejoindre au Maroc, où elle est agressée dans la nuit, au volant d’une voiture, par des inconnus qui lui brisent la colonne vertébrale. Elle aussi avait souscrit des assurances-décès, pour un montant de 7 millions d’euros. Principale accusatrice, Mlle Derouette assurera au procès être aujourd’hui certaine qu’il s’agissait de “Jamel”.
Prise d’un malaise à l’issue de l’audience, cette dernière s’est dite “très fatiguée” et “très soulagée”.
C’est également au Maghreb que Jamel Leulmi aurait prévu d’emmener Karine T., considérée par l’accusation comme sa troisième “proie“, dont le témoignage a sans doute contribué à faire basculer un procès sevré de preuves tangibles. Cette vendeuse, présentant selon les experts un “léger retard mental”, a expliqué, bouleversée, avoir souscrit des assurances-décès -3 millions d’euros – pour cet amant rencontré dans un club échangiste, alors qu’elle ne sait ni lire, ni écrire.
“C’est un caméléon. Ses armes: un physique affûté, un corps qu’il travaille“, a résumé Me Caty Richard, avocate de Julie Derouette. Les experts psychologiques relèvent chez lui une personnalité “manipulatrice avec des traits pervers”.
Par manque d’éléments, la Cour ne s’est pas posé la question des complicités de M. Leulmi, en particulier le rôle de sa compagne, Céline, qui lui fournit un alibi et un soutien indéfectible. Dans ce dossier, “elle est partout, elle est tout le temps-là“, note Me Richard.
Mais Jamel Leulmi, le professeur de technologie qui se prétendait enseignant à l’université ou consultant richissime, est le seul à dormir en prison. “C’est quelqu’un qui avait envie d’avoir une autre vie“, a commenté la mère de Kathlyn Vasseur. “Et le seul moyen de changer de vie, c’est d’avoir de l’argent. Quitte à assassiner“.
AFP