Dossier : la part de plus en plus importante des complémentaires dans le remboursement des soins
L’information n’aura échappé à personne, les tarifs des complémentaires santé ont sensiblement augmenté – en moyenne de 5% – en 2010. Une des principales raisons invoquées par les assurances, les mutuelles et les institutions de prévoyance concerne le désengagement de la Sécurité sociale dans le remboursement des dépenses de santé. Une donnée appuyée par le rapport annuel de la Direction de la recherche, des études et des statistiques (Drees) sur « les comptes nationaux de la santé en 2008. »
Selon la Drees, la part de l’Assurance maladie dans le remboursement des soins ne cesse de diminuer depuis une quinzaine d’années. « De 1995 à 2008, la structure du financement des dépenses de santé s’est légèrement modifiée : la part du financement par la Sécurité sociale s’est réduite (de 77,1 % à 75,5 %). » Par le jeu des vases communicants, ce sont les assurances privées ou les assurés qui compensent. « La part financée par les organismes complémentaires continue à progresser, passant de 13,2 % en 2004 à 13,7 % en 2008. La part restant à la charge des ménages progresse, passant de 8,3 % en 2004 à 9,4 % en 2008. »
Ces chiffres s’expliquent par une hausse régulière des dépenses de santé, conjuguée à un creusement presque inexorable des comptes de l’Assurance maladie. Rappelons que le déficit de la Sécurité sociale pourrait battre un nouveau record en 2010 en dépassant les 30Mds d’euros. Les différents gouvernements qui se sont succédé et emparés de ce dossier se retrouvent ainsi tiraillés entre le droit et l’accès aux soins pour tous, inscrits dans la Constitution, et le devoir de maîtrise des déficits de la Sécurité sociale.
La tendance semble plutôt à une baisse des déficits au regard des différentes mesures prises dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale adopté à la fin 2009 par le Parlement. Augmentation du forfait hospitalier, déremboursement de médicaments, franchises médicales, le système d’assurance privé prend le pas sur l’Assurance maladie au détriment de la solidarité nationale. Sur les 215Mds d’euros de dépenses courantes de santé en 2008, 165Mds étaient pris en charge la Sécu, 20,21Mds par les assurés et le reste par les sociétés d’assurance, les mutuelles et les institutions de prévoyance. Plusieurs associations ont d’ailleurs déposé un recours devant le Conseil d’État pour dénoncer cette situation (voir notre article).
Ce désengagement de l’Assurance maladie touche donc directement au portefeuille des français. Tout d’abord parce que les différentes franchises médicales et les déremboursements de médicaments ne sont pas toujours entièrement compensés par les organismes complémentaires. Une grande majorité des complémentaires fondent leurs taux de remboursement sur ceux de la Sécurité sociale. Les deux suivent alors la même courbe descendante, alors que le coût des soins (lunettes, dentistes…) augmente. Les dépassements d’honoraires sont en outre devenus une pratique très courante chez les praticiens.
De plus, les organismes complémentaires répercutent leur implication croissante dans la prise en charge des dépenses de santé, que ce soit pour le régime général ou à travers leur participation au financement du Fonds CMU (Couverture maladie universelle). En 2009, la taxe sur le chiffre d’affaires « santé » des organismes complémentaires est passée de 2,5% à 5,9%. Il faudra vraisemblablement attendre un retour au positif des comptes de l’Assurance maladie pour voir la solidarité nationale reprendre de l’envergure. Une chose est sûre, ce ne sera pas pour 2010.
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