Justice/Distilbène : La présentation de l’ordonnance indispensable pour être indemnisé
Les femmes exposées in utero au Distilbène, et atteintes depuis d’un cancer, doivent démontrer, ordonnance à l’appui, que leur mère prenait ce médicament, si elles veulent obtenir une indemnisation, a tranché jeudi la Cour de cassation.
Si cette décision confirme une jurisprudence constante en France, elle était très attendue par les “filles Distilbène” qui espéraient un assouplissement de la preuve attendue par les tribunaux. Le DES ou diéthylstilbestrol est une hormone de synthèse prescrite sous la marque Distilbène aux femmes enceintes en France entre 1950 et 1977 pour prévenir les fausses couches, les risques de prématurité et traiter les hémorragies de la grossesse. Sa nocivité a été clairement établie chez les enfants exposés in utero, en particulier chez les filles, atteintes pour certaines de cancers du vagin et du col de l’utérus. Au moins 160.000 enfants auraient été exposés au produit.
En novembre 2007, une femme atteinte d’un cancer du col de l’utérus à la suite de l’exposition de sa mère au Distilbène en 1965, s’était vu refuser une indemnisation par la cour d’appel de Versailles, sous prétexte que, plus de quarante ans après, elle n’avait pu produire l’ordonnance prescrivant le médicament à sa mère. Elle avait alors formé un pourvoi en cassation.
Mais jeudi, la 1ère chambre civile de la Cour a rejeté ce pourvoi et confirmé l’analyse des magistrats versaillais. Déboutées sur ce point, les filles Distilbène ont toutefois remporté une victoire face aux laboratoires Novartis et UCB Pharma qui fabriquaient la molécule.
En effet, la Cour a cassé une autre décision de la cour d’appel de Versailles, d’avril 2008, qui avait débouté une victime ayant pu fournir une ordonnance de DES, mais qui n’avait pu démontrer si le pharmacien lui avait délivré du Distilbène commercialisé par Novartis ou UCB Pharma.
Jeudi, la Cour de cassation a annulé cette décision, considérant qu’il revenait non pas à la victime, mais aux laboratoires “de prouver que leur produit n’était pas à l’origine du dommage”.
Concrètement, cela signifie qu’une victime du Distilbène disposant d’une ordonnance pourra à l’avenir poursuivre indifféremment les deux laboratoires.
Si devant le tribunal, ni Novartis, ni UCB Pharma ne parvient à se dédouaner, ils devraient se partager l’indemnisation.
Avec AFP