Sécurité sociale: vers un déficit record de 20 milliards d’euros
Le déficit de la Sécurité sociale pour 2009 n’en finit pas d’être réévalué à la hausse: un « trou » record de plus de 20 milliards d’euros est désormais envisagé, sous l’effet des destructions d’emplois liées à la crise qui tarissent ses recettes.
Cela faisait plusieurs semaines que la barre symbolique des 20 milliards pour le régime général (salariés) était franchie dans les prévisions officieuses du gouvernement, mais c’est la député UMP Marie-Anne Montchamp, qui l’a officialisé mardi lors d’une communication devant la commission des Finances de l’Assemblée nationale.
« L’effet de moindres recettes pourrait porter le déficit du régime général entre 20 et 21,3 milliards d’euros en 2009 », a-t-elle estimé. Ces chiffres sont à rapporter à des recettes autour de 300 milliards pour le régime.
En 2008, lors de la préparation du budget 2009, le gouvernement avait fixé un objectif à 8,6 milliards d’euros de déficit pour l’ensemble des quatre branches (maladie, vieillesse, accidents du travail, famille), basé sur des hypothèses économiques d’avant-crise.Puis, à mesure que s’assombrissaient les perspectives pour l’emploi, les prévisions se sont dégradées.
Le budget de la Sécu, voté par le Parlement en décembre, avait déjà rectifié le tir, à 10,5 milliards d’euros. A la mi-mars, le ministre du Budget Eric Woerth voyait le déficit « aux alentours de 18 milliards d’euros ».
Il est donc évident depuis des mois que le record de 2004 (11,9 milliards de déficit) sera largement dépassé et l’objectif d’un équilibre du régime général d’ici 2012 compromis.
Mme Montchamp note que la branche maladie respecte « globalement ses objectifs » et que 2009 devrait se traduire par de « moindres dépenses » sur la branche vieillesse. C’est donc la chute des recettes la principale explication de cette plongée.
La Sécurité sociale est en effet très sensible aux fluctuations de l’emploi, les recettes du régime général provenant toujours aux deux tiers des cotisations sociales assises sur les revenus professionnels.
Se pose désormais la question des mesures qu’envisage le gouvernement. Un début de réponse pourrait être donné lundi prochain, après la remise du rapport de la Commission des comptes de la Sécurité sociale (CCSS) et avant que ne commence vraiment l’élaboration du budget 2010 de la Sécurité sociale.
M. Woerth a déjà indiqué ne pas vouloir augmenter la Contribution pour le remboursement de la dette sociale (CRDS) ou la CSG (contribution sociale généralisée). La ministre de la Santé Roselyne Bachelot a expliqué samedi au Congrès de la Mutualité française qu’elle n’était pas “adepte des grands plans et des réformes du grand soir” pour l’assurance maladie, plaidant pour poursuivre la maîtrise des dépenses.
« La stratégie choisie par les pouvoirs publics de redresser les finances publiques par la seule maîtrise des dépenses, sans augmentation du poids des prélèvements, est un pari très incertain », juge l’économiste de la santé Jean de Kervasdoué, dans son Carnet de santé de la France 2009, à paraître.
Le chercheur pointe les risques de « crise de recettes » et suggère notamment de remplacer les cotisations sociales patronales par des recettes fiscales.
« Ce que la crise masque, c’est que les dépenses augmentent plus vite que les recettes en général », a expliqué à l’AFP Bruno Palier, chercheur au CNRS, spécialiste de la Sécu, ajoutant: « Cela signifie qu’il faut des réformes du financement, mais aussi des nouveaux chemins de croissance, pour que plus de gens travaillent ».
AFP