Le fonds de garantie des victimes de terrorisme et des autres infractions : Une large compétence réparatrice
En 1986, un fonds d’indemnisation est créé en faveur des victimes d’attentats en France et des ressortissants français victimes d’actes de terrorisme à l’étranger. En 1990 (1), le fonds d’indemnisation des victimes d’actes de terrorisme est étendu aux victimes d’autres infractions pour devenir le Fonds de Garantie des victimes d’actes de Terrorisme et d’autres Infractions (FGTI).
La loi du 1er juillet 2008 (2), entrée en vigueur le 1er octobre de la même année, confie au FGTI une nouvelle mission : aider les victimes d’infraction qui ne peuvent pas bénéficier d’un indemnisation à obtenir l’exécution, par l’auteur des faits, de la décision de justice leur accordant des dommages et intérêts.
Ainsi, tout préjudice résultant d’une infraction est susceptible d’être pris en charge par le fonds. La décision de la Haute juridiction étudiée ici offre un éclairage sur ce que le législateur entend par « préjudice né d’une infraction ».
En l’espèce (3), le mari d’une victime d’un vol s’était élancé à la poursuite de l’auteur de l’infraction. Au cours de l’intervention, il a chuté et s’est blessé. Il a alors saisi la commission d’indemnisation des victimes d’infraction près du Tribunal de Grande Instance afin d’expertiser son préjudice et obtenir par la suite l’allocation d’une provision (4).
Les juges du fond, saisis de l’affaire, acceptent la demande. A leurs yeux ; le préjudice subi par le mari de la victime directe du vol fait de lui une victime par ricochet susceptible d’être indemnisée par le fonds.
Le FGTI décide alors de former un pourvoi en cassation.
D’une part, le fonds rappelle que l’article 706-3 du Code de Procédure pénale (CPP) précise que ce fonds ne répare que les préjudices résultant de faits qui présentent le caractère matériel d’une infraction. Or, le préjudice, en l’espèce, n’est pas né directement de l’infraction, puisque l’individu s’est lancé de sa propre initiative à la poursuite du voleur. Ce n’est qu’au cours de cette course choisie que le préjudice est né, donc le préjudice serait indépendant de l’infraction.
D’autre part, il relève que le préjudice subi par un proche de la victime directe n’est indemnisable qu’à condition qu’il résulte par ricochet de celui de la victime. En l’espèce le préjudice du mari ne résulte pas directement du vol subi par son épouse mais de sa propre chute.
Les juges de cassation rejettent le pourvoi et déclare que le préjudice résulte en l’espèce du vol sans qu’il puisse être reproché à la victime « compte tenu des circonstances, de ne pas être resté passif en essayant de récupérer l’objet dérobé et en poursuivant à cette fin l’auteur de l’infraction ». La Cour suit un raisonnement très clair : l’article 73 du CPP (5) reconnaissant à tout citoyen une compétence pour appréhender l’auteur d’une infraction, il ne peut être reproché à une personne de tenter d’appréhender un tel individu, de sorte qu’il doit avoir la possibilité d’être indemnisé du préjudice résultant de cet acte.
En conclusion, la victime directe est par essence indemnisable, mais la victime indirecte l’est tout autant, même lorsqu’elle est intervenue de se propre initiative dans le chemin du criminel.
(1) Loi n°90-589.
(2) Loi n°2008-644.
(3) Civ. 2ème, 9 avril 2009 n°08-16.424
(4) Au sens de l’article 706-3 du Code de Procédure pénale.
(5) « Dans les cas de crime flagrant ou de délit flagrant puni par une peine d’emprisonnement, toute personne a qualité pour en appréhender l’auteur et le conduire devant l’officier de police judiciaire le plus proche. »